Guppy du commerce et acclimatation en aquarium naturel ou low-tech




Tout a été écrit sur le guppy.
Tout et n’importe quoi, c’est vrai, mais il existe tout de même des spécialistes absolument imbattables sur ce poisson archi-connu depuis plus de 150 ans.

Guppy blue neon Delta

Ma seule expérience un peu originale est celle de l’élevage du guppy en low-tech et même en no-tech.
Comme dirait mon pote René (eh oui, chuis pas tout jeune !), le no-tech, c’est comme le low-tech mais très très low. C’est quand tu as perdu même ton thermomètre !


Quelque part, c'était le début d'un long parcours qui a permis aujourdhui l'existence d'Aquazolla.

J’ai donc une affection particulière pour les guppies, avec lesquels tant d’aquariophiles ont découvert la reproduction des poissons.

Pour revenir sur Pépette, la première guppette poubellisée voici presque 20 ans, j’en garde un souvenir ému.
Toute petite femelle guppy sortie « en estive » au jardin au mois de mai, Pépette avait disparu dans l’eau verte. Elle en était ressortie à l’automne, par une eau à 11°C en octobre, méconnaissable tant elle était devenue énorme et secouait l’épuisette en se débattant. Elle a passé le reste de sa vie à me pondre environ 120 ou 130 alevins tous les mois !

Alevin guppy nouveau-né

Pendant que je la croyais morte, puisqu’elle vivait dans des conditions formellement interdites par tous les livres d’aquariophilie, Pépette était en fait tranquillement cachée à la vue des humains, occupée à gober tous les insectes et bestioles que le vent lui apportait, peut-être quelques algues, bercée par la pluie et la brise, baignée de lumière naturelle et profitant des nuits étoilées…
Lumière et température évoluaient sans cesse, mais de façon toujours très progressive, elle pouvait choisir à tout moment entre l’eau chaude de la surface et la fraîcheur du fond, protégée par des parois opaques et à l’écart des bruits de pompes ou de filtres stressants.
Et pas de mâles non plus pour l'embêter !

Le parfait compromis entre captivité et vie sauvage au bénéfice exclusif du poisson et au détriment de l’humain (si on peut qualifier ainsi Mauricette).
L’humain avait disparu de sa life de Pépette.

C’était en 2003, et l’année suivante nous fondions le forum Poubellarium.fr, une sorte de Woodstock de l’aquariophilie, où les dogmes assénés sur les forums habituels étaient tous taillés en pièces, les uns après les autres.

Une fois de plus, le guppy faisait avancer la science !

Actuellement, j’élève deux variétés de guppies.
Des Blue neon et des Tuxedo rouges à queue ronde.
Pourquoi ceux-là ?
Pasque.
D'abord.

Contrairement à ce qui se dit, je ne considère pas que le guppy soit vraiment le bon poisson pour débuter, ni le moins fragile.
Un Betta ou de nombreux cyprinidés sont de bien meilleurs candidats pour découvrir l'aquariophilie, je trouve.

Le guppy doit son succès à sa reproduction facile puisque les petits naissent tout faits et capables de se débrouiller.
Et aussi à son incroyable variabilité génétique qui a permis d’innombrables coloris.
Mais pas à sa « solidité » ni à sa rusticité.

Guppy snake sunset Delta

Aujourd’hui, les guppies que l’on trouve dans le commerce font pratiquement partie des poissons les plus fragiles qui soient.
Leur acclimatation est vraiment problématique et leur espérance de vie est souvent très courte.

Les professionnels avec lesquels j’en parle considèrent comme impossible de nos jours de les acclimater sans antibiotiques.
Un importateur m’a expliqué récemment que les éleveurs (surtout d’Europe centrale aujourd’hui) bourrent les bassins d’élevage d’antibiotiques (ça, on le savait), mais aussi d’amphétamines, comme facteurs de croissance.
Si cela est vrai, nous achetons des poissons dopés, sans défenses immunitaires et sans microbiote digne de ce nom.
Ce qui explique qu’ils semblent si beaux et gros, mais qu’ils trépassent ensuite dès qu’on les met au contact de la vraie vie dans un vrai aquarium.

Les guppies du commerce sont presque des « poissons-bulles », à l’image de ces « enfants-bulles » qui grandissent sous tente stérile, incapables de se défendre contre la moindre bactérie, même la plus anodine et inoffensive.

C’est un problème, car il est devenu très difficile de se procurer des guppies de belles variétés chez un éleveur amateur en France.

Après les guppies importés d’Asie qui étaient déjà une véritable plaie sur le plan sanitaire, nous n’avons pas gagné au change avec les élevages désormais installés en Tchéquie, Slovaquie et Pologne pour les principaux.

Personnellement, lorsque j’achète des guppies, ne voulant pas prolonger lors de l’acclimatation le cycle infernal des antibiotiques, je me refuse à traiter l’eau. Ce ne serait que repousser le problème de quelques semaines sans rien résoudre.

Toute personne qui a comme moi une épouse toute en intestins sait que les antibiotiques, ça détraque le microbiote.
Et détruire toute une biodiversité microbienne qui a parfois mis des années à s’équilibrer dans une batterie d’aquariums, ça me fait mal aux doigts de pieds.

Ma stratégie est donc la suivante.

Je l’applique avant tout aux guppies, mais elle vaut pour tout poisson fragilisé par le transport, l’achat, bref tout chamboulement si profond de sa petite vie.
Mon principe de base est très simple : la réduction du stress tellement nocif.
L’apaisement consiste à rapprocher l’animal de ses instincts les plus profonds.
C’est vrai pour tout ce qui vit, soit dit en passant.
S’éloigner de ces instincts de base n’est pas un problème, mais c’est coûteux en énergie et en stress, et un animal affaibli n’en a pas les moyens.

Je prépare donc à l’avance leur bac.
Il reçoit de l’eau vieillie.
L’eau « vieillie » est un vieux concept de mes débuts, mais il a du sens.
Une eau vieillie a un microbiote équilibré et stabilisé. Je l’allonge éventuellement avec de l’eau de pluie, puisque j’ai la chance d'en disposer en quantité.

Je place dans le bac toutes les bestioles aquatiques que j’ai sous la main : aselles, daphnies, ostracodes de toutes sortes, Blackworms, glossiphonies, physes ou planorbes. Le plus d'espèces, le plus de variété possible.
Je jette dans l'eau un ou deux grains de riz paddy pour générer un peu plus de biodiversité et donc de vie.
Une plante de surface (azolla, lentille trilobée ou lentille d’eau) et une plante de pleine eau (Cerato, Myriophylle ou Najas) sont ajoutées, histoire de complexifier l’espace et de le rendre ainsi plus rassurant.

L’idéal, c’est d’attendre une ou deux semaines. Le riz germe, les plantes se couvrent d’infusoires, les bestioles s’installent et surtout elles ensemencent le milieu avec leurs crottes.
Le but est que les poissons, à défaut de pouvoir débouler dans un milieu aseptique, bénéficient dès leur arrivée d’une diversité maximale de micro-organismes, pour qu’aucun ne domine, et que les pathogènes éventuels soient tenus en respect par les autres. Plus la diversité est grande, moins une espèce domine.

Guppy Moscow black

Mes poissons arrivent.
Je vide leur sac de transport dans un pot transparent que je fais flotter dans le bac, en retirant les 3/4 de leur vieille eau toute pourrie.
À ce stade, ils ont de l’oxygène (enfin!) et ils découvrent leur nouveau monde avec les yeux !

Puis je verse, tasse par tasse, l’eau de l’aquarium dans le pot.
Pas besoin d’attendre des heures entre deux tasses. Il suffit de limiter l’effet agressif, le choc du changement d’eau. Donc, toutes les 3 à 5 minutes, c’est bien.
Je leurs sers quelques vers Grindals directement dans leur pot. Ils les mangent ou pas, c’est à eux de voir.
Et, enfin, après au moins une heure, je les libère dans l’aquarium, si possible sans l’eau du pot (si possible, hein!).

Et là, ils se retrouvent comme des Mini-Mattiers à Disneyland !
Des daphnies partout, des infusoires, des bestioles rigolotes à tous les parfums, qui s’enfuient quand on approche ! Trop cool !
Bref, c'est la fête, le stress diminue et l'appétit est là, preuve que tout va mieux.

Personnellement, je n’éteins pas la lumière.

J’acclimate couramment des guppies importés ayant passé plus de 3 jours en sachet depuis la Tchéquie de cette façon. Et les pertes sont exceptionnelles.

En revanche, les premiers alevins nés sur place sont ensuite d’une rusticité totale.
Dès la naissance, ils ont un microbiote complet et évoluent dans un milieu riche en vie. Ils n’héritent pas de l’état déplorable de leurs parents.

Ce sont ces alevins nés chez moi que je sors l’été suivant en bassin ou en poubellarium.

Acclimatés très progressivement à l’extérieur lors d’une journée ensoleillée, ils vivront pendant des mois la vie de rêve qu’a connue Pépette,leur aïeule, pionnière du poubellarium voilà 20 ans.

Voici pour l’acclimatation des guppies-zombies du commerce.

Je vous prépare maintenant un petit article sur les idées reçues sur le guppy.

Comme vous le voyez, entre Aquazolla.com et les articles pour le blog, je suis bien occupé, ce qui explique (en partie) la jachère sexuelle de Mauricette.

Faut vraiment que je trouve un Chippendale bas de gamme dans la région, ça me dégagera du temps...


(Tous les ingrédients de l'aquariophilie naturelle sont sur Aquazolla.com)

Commentaires

Unknown a dit…
Toujours autant de plaisir à le lire. Merci à toi.
Serge a dit…
Bonsoir ,ton article est vraiment bien ,enfin on parle de simplicité et surtout d’equilibre Naturel
Merci
Anonyme a dit…
Vous me faites mourir de rire et vos articles sont très intéressants, bravo. Dans l'attente du prochain !
Unknown a dit…
Bonjour votre article est super moi mêmes je m'était lancé dans l'élevages de guppy edlers et normal mais malheureusement j'ai tout perdu je ne sais absolument pas pourquoi je n'utilise aucun produit pouvait vous m'aidez pour m'a prochaines productions avec éventuellement des documents pouvant m'aidez a mieux gérer mon élevage. Merci
Unknown a dit…
Allez faire un tour sur le forum poubellarium:
http://www.poubellarium.fr/

Vous y trouverez plein de conseils.
Unknown a dit…
Bjr quel est le poisson le plus simple a acheté pour face des petit merci
julie a dit…
Bonjour,
Nous avons une mare dans notre jardin qui "vit" depuis 9 ans, l'équilibre se fait naturellement.
En lisant votre article, je me demande si ce ne serait pas une idée simple et naturelle de commencer notre aquarium avec cette eau naturellement riche. Nous pourrions installer l'aquarium avec cette eau, laisser reposer 2 semaines avant l'arrivée de qq guppys. Puis régulièrement apporter/changer une partie de l'eau avec l'eau de cette même mare.
Qu'en pensez-vous ?
Merci pour vos conseils et votre blog très riche !
Julie
Maylis a dit…
Demandez, et Mattier vous répondra ��.
Pour un projet de nouveau bac low-tech (je ne conçois aucun autre type d'aquarium), j'étais à deux doigts d'abandonner l'idée d'y mettre des guppies, ayant lu en effet qu'ils étaient incompatibles avec le low-tech. Et là, miracle, je tombe sur LA solution ! Merci, Mattier, toujours un grand plaisir de vous lire ��

Posts les plus consultés de ce blog

Pas d'aquarium sans ostracode !

Crevettes Red cherry en poubellarium d'hiver !

Anémone d'eau douce en aquarium naturel