Ostracodes et aselles : les détritivores aquatiques
Je me disais que ça faisait longtemps qu'on n'était pas allés voir l'inspecteur des impôts (c'est l'époque).
En même temps, c'est pas super simple : faut apporter une pelle, une pioche, et en plus on se rappelle jamais exactement où on a enterré le corps.
Mais la dernière fois, on voyait bien le squelette.
C'est par cette association d'idées que j'en suis venu à me dire que ce serait bien d'illustrer le rôle des détritivores aquatiques en ressortant une photo prise récemment dans un de mes bacs à aselles.
Voici donc l'œuvre en question que j'ai choisi d'intituler : "squelette de feuille".
Parce qu'il se trouve que les nervures des feuilles sont plus riches en lignine (composant du bois) et que seuls certains champignons savent la décomposer.
Comme les champignons sont rares sous l'eau et surtout ceux-là qui ont besoin d'oxygène, on se retrouve donc avec des déchets végétaux entièrement mangés sauf le "bois". Et donc les nervures des feuilles par exemple.
C'est ce qui explique le mystère du fameux "bois flotté" : le bois immergé longtemps se débarrasse de toutes ses parties comestibles par la vie aquatique, et ce qui reste est parfaitement stable sous l'eau, puisqu'il faudrait des champignons pour le grignoter. D'où son intérêt pour décorer nos aquariums.
Cela signifie, en creux, que tout le reste est comestible pour la vie aquatique.
Par exemple, si vous mettez du bois "non flotté" en aquarium, il va être envahi de bactéries qui mangent la cellulose et tout ce qui n'est pas cette fameuse "lignine". Et comme les bactéries respirent beaucoup, et même énormément, vous vous retrouvez avec vos poissons le ventre en l'air par manque d'oxygène.
Dans la nature, les déchets morts ne sont pas mangés que par des bactéries, mais avant tout par les détritivores. C'est-à-dire les petites bêtes qui mangent les déchets.
Celles précisément que vos poissons dévorent et qui ne peuvent donc pas vous aider à manger votre bois non flotté...
Mais dans la nature, il y a un moins d'un poisson pour des dizaines de mètres cubes d'eau et les bestioles ne sont pas chassées en permanence par les poissons.
Ce sont donc elles qui font ce travail absolument indispensable aux écosystèmes aquatiques. Les principales sont les aselles et les ostracodes. Les Blackworms aussi, mais dans une moindre mesure.
C'est pour cette raison que les aselles sont si prisées des possesseurs de bassins, qui les mettent dans leurs filtres où elles dégradent tranquillement, à l'abri des poissons, les feuilles mortes tombées à l'eau.
De même, les ostracodes de toutes espèces sont en bonne place parmi les détritivores aquatiques. C'est bien simple : leur population explose littéralement en quelques semaines (selon les espèces) en présence de déchets abondants.
La photo ci-dessous a été prise dans un de mes bacs d'ostracodes nageurs (jaunes). Les dépôts orangés sur les nervures restantes sont des amas d'œufs. Genre les mecs, ils pondent au restaurant.
Feuille dégradée chargée de pontes
Comme les ostracodes, pas plus que les aselles, ne peuvent manger les parties lignifiées, ils laissent les nervures et mangent la cellulose.
En aquarium, en matière de détritivores, on est réduit à se contenter de ceux que les poissons ne mangent pas : les escargots : physes, planorbes, mélanoïdes...
Dans un aquarium sans poissons, toute cette micro-faune, toute cette diversité cohabite, et il suffit bien souvent de quelques feuilles mortes pour manger toute l'année !
Si en revanche vous sortez cette dentelle de feuilles de l'eau, elle ne sera plus éternelle. À l'air libre, des champignons seront cette fois-ci présents et dégraderont ces tissus lignifiées pour faire de l'humus.
La décomposition des trucs, ça se passe donc pas tout-à-fait pareil sous l'eau et à l'air libre. Parce que certaines tâches exigent des champignons ayant besoin d'oxygène.
Faudra qu'on y pense pour le dentiste.
Je l'aime pas, le dentiste.
Des fois qu'il y ait des trucs durs à décomposer...
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