Le ciel n'est pas vide, ce soir.
Mes amis,
Je ne vous parle pas très souvent, mais vous êtes presque les seuls à qui je parle.
Je suis un vieux bonhomme qui vit au milieu de ses bidons et ses bassines et qui ne parle vraiment qu’à la nature.
Je vis un peu comme un ermite.
Vous êtes mes amis car je sais que vous m’aimez bien quand vous me lisez.
Alors c’est à vous que je vais confier ma peine ce soir. Elle est immense.
Je viens d’apprendre la mort d’un frère. Un ami constant, d’une fidélité déraisonnable, le meilleur ami de mon épouse. C’est de lui que je me suis inspiré pour vous parler du maçon portugais de mes billets.
En réalité, il était venu de Sicile.
Une crise cardiaque l’a emporté ce soir et je suis tout seul avec mes larmes. Mes bestioles ne comprendraient pas pourquoi leur Papy pleure.
S’il vous plaît, que ceux d'entre vous qui croient en quelque chose, n’importe quoi, ou même juste en l’homme ou en l’amour, aient la gentillesse, s’ils le peuvent, d’allumer chez eux une petite lumière, un bougie, quelque chose. Un truc qui l’aide à partir autrement que dans l’obscurité froide de l’oubli.
Certains d’entre vous savent qu’avant l’aventure d’Aquazolla, j’ai connu une épreuve parmi les pires, un combat qui m’a tout fait perdre et a failli m’emporter.
Lui a toujours été là, à chaque étape, tout simplement, même quand tous les autres étaient partis.
Rien de ce que je construirai désormais, je le jure, n’existera sans que je grave son prénom quelque part. Jamais aucun temple sans une pierre à son nom
Il est parti comme partent les petits, les pauvres, sans pouvoir payer sa chambre malgré deux boulots dont un de nuit, mal soigné parce que mal instruit, plus superstitieux que scientifique.
Parce que les petits vivent moins longtemps que les autres.
Il n’osait pas sourire devant les gens parce qu’il n’avait pas les moyens de remettre les dents qui lui manquaient.
Son personnage disparaîtra, vous ne m’en voudrez pas, de mes billets désormais. Je n’aurai plus le cœur...
Je suis malheureux, triste, et un peu révolté.
Pensez aux petites lumières, s’il vous plaît.
Je serais heureux que l’ombre ne se referme pas trop vite sur lui.
Il y a des petites gens qui ne laissent pas le monde pareil qu’avant d’avoir existé.
Il en était.
Mon fils m'a appelé ce soir, lui qui a affronté toutes les épreuves avec nous et avec lui, qui était son parrain de cœur. Nous avons, mon fils et moi, juré ce soir de combattre le mal par le bien.
Pour que les petits ne soient plus jamais les derniers.
Et on verra bien où ça nous mène.
Commentaires
J'en ai allumé une pour lui. Rouge...je me suis dit que ça plairait à un sicilien. Ca evoque le soleil, les tomates du pays.
Bon courage à vous
Courage et merci pour tous vos partages
Courage à toi et à ton épouse.
Signé une de tes lectrice assidue et passionnée de vie tout comme toi.
Mes sincères condoléances.
Bon courage
Je comprend votre douleur. Ça semble toujours injuste de perdre ceux que l’on juge exceptionnels, ceux qui nous semblent bons ou justes, ceux qui remplissent nos vies pour y laisser un grand vide après
J’espère que vous traversez ce deuil sans trop d’embûches et que vous ne perdrez pas définitivement ce goût que vous avez de partager vos passions, car vous le faites avec beaucoup de vie, de justesse et d’humour
Une bougie sera allumée ce soir, comme vous le suggérez, pour que - l'ombre ne se referme par trop vite - sur votre ami parti.
Mes plus chaleureuses pensées vous accompagnent.
https://youtu.be/Z-oh3oigeG4
La musique est parfois un baume.